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UN CONTE DE NOËL

(Dessins de Chloé, 6 ans)

Il y a bien des années, les hivers étaient plus froids, la neige plus abondante et les étoiles plus nombreuses dans le ciel. Lorsqu’arrivait la période des vacances de Noël, souvent les enfants patinaient sur les étangs et dévalaient les pentes sur des luges de bois. Après avoir construit des bonshommes de neige, ils rentraient à la maison manger du pain d’épices trempé dans du chocolat chaud.

Cette année, malgré le froid, Caroline et son frère Mathieu s’étaient bien amusés dans le parc avec leurs amies, Adriana et Christine. Ils avaient formé deux équipes et passé l’après-midi à se lancer des boules de neige. Mathieu préparait de belles grosses boules bien compactes alors que Caroline les lançait avec beaucoup d’adresse. Tous ces exercices leur avaient ouvert l’appétit.

Mais aujourd’hui est un jour spécial. C’est la veille de Noël et ils doivent rentrer à la maison souper et dormir tôt. Car cette nuit, le Père Noël va passer chez eux leur remettre des cadeaux, comme il le fait avec les enfants du monde entier.

Caroline et Mathieu se sont donc dépêchés pour manger, se brosser les dents et mettre leur pyjama. Caroline, plus âgée que son frère, lui lit une histoire avant de dormir. Et bientôt, les lumières sont éteintes et tout le monde dort dans la maison.

Caroline fait de beaux rêves. Elle se voit avec Adriana, son amie, dévaler la colline sur sa luge. Tout à coup, elle entend un bruit dans le salon qui la tire de son sommeil. Elle descend les escaliers sans faire de bruit et, à pas de loup, arrive au salon.

Oh ! Surprise !

Voilà que dans le grand fauteuil où s’assoit d’habitude son papa, se trouve un grand homme habillé tout en rouge, avec une belle barbe blanche et des cheveux tout blancs qui lui tombent sur les épaules.

Mais c’est le Père Noël !

Caroline est tout étonnée et un grand « OH ! » lui échappe. Elle entre au salon sur la pointe des pieds.

Le Père Noël ne semble pas l’avoir entendue. Il a les yeux fermés et respire à grand peine. Il a l’air de dormir profondément. Sans doute qu’il est fatigué de son long voyage sur son traîneau, à travers ciel.

Caroline s’approche du Père Noël et pose la main sur son bras, doucement. Celui-ci ouvre les yeux et semble sortir d’un rêve.

- Ah Caroline ! Comme je suis content de te voir ! J’ai fait un long trajet et je suis heureux d’être enfin chez toi. On m’a dit que tu as été sage cette année. C’est vrai ? Dis-moi.

- Oui, Père Noël, j’ai été sage et j’ai eu de bons résultats à l’école. Je sais lire maintenant.

- Bravo ! Et ton frère, tu t’en occupes aussi ?

- Bien sûr, Père Noël, nous jouons souvent ensemble. D’ailleurs, aujourd’hui nous avons fait une bataille de boules de neige contre nos voisins. Dis, as-tu apporté un cadeau à mon frère ?

- Bien sûr, Caroline, je lui ai apporté un cadeau et à toi aussi. Mais avant de vous les offrir, j’aimerais que tu me donnes un verre de lait, s’il-te-plaît.

- Avec plaisir, Père Noël. Attends-moi un instant, je vais le chercher à la cuisine.

Durant l’absence de Caroline, le Père Noël ferme à nouveau les yeux. Il a vraiment l’air fatigué. Quand Caroline revient avec le verre de lait, elle le trouve endormi.

- Père Noël, voici ton verre de lait, lui dit-elle en le tirant gentiment par sa manche.

- Oh merci, ma Caroline chérie ! lui dit le Père Noël en prenant le verre de lait.
 

Il le boit lentement et ne semble pas pressé. Caroline est intriguée parce qu’elle sait que le Père Noël travaille très fort ce soir-là à parcourir le monde pour distribuer les cadeaux aux enfants sages. Elle s’inquiète de le voir dans cet état.

- Père Noël, qu’est-ce que tu as ? Tu sembles fatigué. Es-tu malade ? As-tu mal quelque part ?

- Non, non, Caroline, tout va bien. Merci de me le demander. Mais c’est vrai que je ne me sens pas très bien, lui répond le Père Noël à voix basse.

- Est-ce que je peux faire quelque chose pour te soulager, Père Noël ?

- Pas vraiment, mon enfant. Tout va bien aller dans quelques minutes.
 

Pourtant, Caroline sent que le Père Noël est épuisé et qu’il ne veut pas le lui dire, sans doute pour ne pas l’inquiéter. Elle voudrait tout de même l’aider de son mieux et lui dit :

- Je sens que quelque chose te dérange, Père Noël. Tu as encore une longue nuit de travail à parcourir le monde et tu ne peux pas passer ta soirée ici. Il faut me dire ce qui te tracasse. Peut-être que je pourrais t’aider.

- Caroline, mon enfant, tu es très sensible et tu as de bonnes intentions. Oui, il y a en effet quelque chose qui me dérange et je vais te le dire. Mais à toi seulement. Il ne faudrait pas que tu le répètes à quelqu’un. D’accord ?

- Bien sûr, Père Noël, je vais garder le silence. Ce sera notre secret à toi et moi. Alors, dis-moi.

- Eh bien, Caroline, je ne suis plus certain d’être capable de faire mon travail, lui dit le Père Noël sur le ton de la confidence. J’ai encore la force mais je n’ai plus le goût…Voilà, je te l’ai dit. Mais, attention ! Tu gardes mon secret,

hein ?

- Oh, bien sûr, Père Noël. Promis ! Mais pourquoi donc, tu n’as plus le goût de continuer à distribuer des cadeaux à tous les enfants ?

- Je ne sais pas…je suis fatigué. Vois-tu, j’ai pris du poids durant l’été, je suis devenu vraiment obèse. J’ai peur que les enfants se moquent de moi parce que je suis trop gros. Parfois, quand je me regarde dans le miroir, je trouve que je ne suis plus beau et svelte comme avant.

- J’aimerai te dire que ton allure physique est sans importance, lui répond Caroline d’une voix assurée. Gros ou maigre, grand ou petit, blond ou châtain, tout cela n’a aucune importance. Ce qui compte vraiment c’est ce qu’on a dans son cœur. Et toi, tu es bon et généreux.

- Peut-être que tu as raison, ma Caroline, lui dit le Père Noël un peu hésitant. Oh ! Et puis, pour tout te dire, je ne sais plus si c’est vraiment une bonne idée d’aller à travers mers et monde pour donner des cadeaux aux enfants. Pourquoi je fais ça, hein ? À quoi ça peut bien servir ? Je ne sais pas si ce que je fais est vraiment utile, si ça sert vraiment à quelque chose…

 

Le Père Noël semble encore plus épuisé tout à coup. Il a la tête basse et une larme coule sur sa barbe blanche. Il boit une gorgée de lait et ferme les yeux.

Caroline lui prend la main. Elle voit bien la tristesse de cet homme qu’elle aime tant et ne sait trop comment le consoler. Comment expliquer au Père Noël qu’il fait un travail très important ? Que les enfants du monde entier l’attendent avec impatience et, surtout, qu’ils lui sont très reconnaissants ? Avant qu’elle ne lui réponde, il ouvre les yeux pour ajouter :

- Vois-tu, Caroline, je crois que les gens veulent juste recevoir leur cadeau mais qu’au fond, ils se fichent un peu de moi. Ils m’attendent toute l’année pour ce cadeau ensuite, bonjour-bonsoir, bye-bye, à l’an prochain…et c’est tout ce qu’ils veulent de moi. À ce rythme-là, chère enfant, je n’ai plus ni la force ni le goût de continuer. Où veux-tu que je trouve l’énergie pour faire ce travail épuisant ? Penses-tu vraiment que je pourrai continuer dans de telles conditions ?

- Tu as parfaitement raison, Père Noël, dans de telles conditions ce n’est pas possible. Mais je crois que tu oublies une chose…

- Ah oui ! s’exclama le Père Noël. Qu’est-ce que j’ai bien pu oublier de si important ?

- Tu as oublié que sans toi la fête de Noël ne serait plus la même. Non pas parce que tu apportes des cadeaux mais parce que tu es devenu un symbole dans le monde entier. Si tu n’es plus là, les enfants ne pourraient plus rêver à toi. Tous les enfants savent que tu es un homme bon et que par-dessus tout tu veux partager cette bonté que tu représentes en leur faisant plaisir.

- Oui, c’est bien beau, le partage, ma chère Caroline, mais je ne suis pas sûr que tous les enfants comprennent comme toi ce que ça veut dire. Je n’ai plus confiance dans ma force à répandre le partage et la joie du partage.

 

Devant le Père Noël épuisé et rongé par le doute, Caroline ne sait trop ce qu’elle doit faire. Soudain, une idée lui vient et elle s’exclame :

- Viens, Père Noël, viens. Nous allons faire un tour ensemble.

- Mais où m’amènes-tu, Caroline ?

- Viens, lui répéta-t-elle. Nous allons faire une ou deux visites ensemble. Je voudrais te montrer l’importance de ta présence et de ce que tu fais.

- Oh ! Mais je ne suis pas si sûr, moi ! grogna le Père Noël. Je n’ai pas envie, te dis-je. Je ne suis pas si sûr…

- Si, si ! lui répondit Caroline avec force et détermination.

Sans attendre davantage, elle met son manteau et le tire par la manche, le forçant à se lever. D’un pas hésitant, le Père Noël la suit dehors. Ils grimpent dans le traîneau et Caroline lance l’ordre de décoller à Tornade, Furie, Fringant, Comète, Cupidon, Danseur, Tonnerre et, bien sûr, à Rudolph, le renne surnommé Nez-Rouge. Les voilà bientôt haut dans le ciel, filant à vive allure vers le village. Caroline demande aux rennes de s’arrêter au-dessus de la maison de ses amies Adriana et Nathalie.

- Père Noël, tu vas venir avec moi et tu vas faire comme tu fais d’habitude quand tu visites une maison. Mais cette fois-ci, je serai avec toi et je vais réveiller mes amies pour qu’elles puissent te voir et te remercier. D’accord ?

- Comme tu voudras, Caroline, répondit le Père Noël, résigné. Je ne vois pas à quoi ça sert, mais enfin, je vais faire comme tu dis.

 

Caroline tire le grand homme par le bras. Il a de la difficulté à la suivre. Ils entrent enfin dans la maison et pendant que le Père Noël s’installe au salon, Caroline se précipite pour réveiller ses amies.

Adriana et Nathalie sont en plein rêve et ont de la peine à ouvrir les yeux. Mais quand Caroline leur dit que le Père Noël les attend au salon, elles sautent du lit et courent à sa rencontre, toutes joyeuses de cette visite tant attendue. Caroline se tourne alors vers le Père Noël tout étonné et lui dit :

- Père Noël, je te présente mes amies Adriana et Nathalie. Elles ont été très sages cette année et nous aimons beaucoup jouer ensemble.

- Père Noël, je rêvais justement à toi il y a quelques instants, s’écrie Adriana. C’est formidable que tu sois ici, avec nous !

 

Devant ces enfants, le Père Noël retrouve sa bonne humeur proverbiale et s’esclaffe d’un grand rire qui fait vibrer les murs du salon. Il s’installe confortablement dans le fauteuil. Les deux filles lui demandent s’il a fait un bon voyage et s’il aimerait manger un morceau de gâteau.

- Merci beaucoup, mais j’ai déjà bien mangé. Chantez-moi une petite chanson pour nous mettre tous dans l’esprit des fêtes.

 

Dans un même souffle, elles entonnent la chanson que tous les enfants connaissent :

- Petit Papa Noël, quand tu descendras du ciel…

 

Et la fête dure ainsi plusieurs minutes dans la gaieté générale. Le Père Noël offre aux deux filles leurs cadeaux : une appli de plusieurs jeux éducatifs à Adriana et une grande boîte contenant une ferme et des animaux miniatures à Nathalie. Elles sont très heureuses et leurs yeux pétillent de joie.

- Il est temps que je quitte, les enfants. Je reviendrai l’an prochain à condition de bien étudier à l’école et d’être obéissantes. Allez, bonsoir et ne réveillez surtout pas vos parents…

Le Père Noël prend Caroline par la main et se dirige vers son traîneau. Ils gardent le silence jusqu’à ce qu’ils soient haut dans les airs, au-dessus des nuages. C’est la pleine lune et Caroline observe le Père Noël. Il a un petit sourire bien caché sous sa grosse moustache.

- Tu as vu, Père Noël, combien mes amies étaient heureuses de te voir? Et ce n’était pas seulement parce que tu leur apportais un cadeau…Elles sont vraiment sincères.

- Mais je n’en doute pas, ma Caroline. Elles m’ont fait plaisir par leur gentillesse et leur bonne humeur.

- Tu vois, Père Noël, comme c’est important ce que tu fais ? Et en plus, tu le fais bien. Tu sais comment nous parler, nous prendre par la main, nous faire chanter. Quand tu nous demandes d’être sages et d’étudier, c’est certain que nous allons t’obéir, parce que tu le demandes si gentiment. Nous aimons te voir heureux et ton grand rire, tes gros HO ! HO ! HO ! sont un signal qui nous transporte dans un monde merveilleux. As-tu remarqué comment mes amies étaient heureuses de t’entendre rire ? Elles riaient elles aussi ! Tu fais un si bon travail, Père Noël, qu’il serait très malheureux pour le monde entier si tu t’arrêtais. Les enfants ne pourraient plus rêver.

- Tu as sans doute raison, Caroline. Répandre la joie et la bonne humeur me donne en effet beaucoup de satisfaction. Quand je vois des enfants heureux autour de moi, plus rien ne compte. Si je suis triste, ma tristesse s’en va et je deviens aussi très heureux.

- Alors, Père Noël, puisque maintenant tu as vu que ton travail est si important, que comptes-tu faire ?

- Eh bien, ma chère Caroline, je ne vois pas ce que je peux faire d’autre à part continuer. Je te remercie de m’avoir montré que lorsqu’on distribue la joie autour de soi, on fait quelque chose de très important. Et de plus, cela nous remplit de joie à nous aussi. N’est-ce pas merveilleux ?

- Je suis contente de t’avoir redonné la force et le désir de poursuivre ton excellent travail. Et maintenant, Père Noël, j’aimerais rentrer à la maison.

Là-dessus, le Père Noël donne ordre à ses rennes de faire un grand tour au-dessus de la lune et de revenir vers la maison de Caroline. Il la dépose devant la porte, lui dit merci et lui fait un geste d’adieu.

- En avant Tornade, Furie, Fringant, Comète, Cupidon, Danseur, Tonnerre et, bien sûr, à Rudolph au Nez-Rouge, en avant ! Nous avons du boulot devant nous ! HO ! HO ! HO !

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